L’intelligence artificielle (IA) s’impose comme un moteur de transformation majeure dans le monde contemporain. Capable d’améliorer les systèmes de santé, d’optimiser les pratiques agricoles ou encore de soutenir la transition énergétique, l’IA représente une opportunité sans précédent pour relever des défis sociétaux complexes.

Cependant, son potentiel ne pourra être pleinement exploité sans un cadre de gouvernance globale adapté. Le rapport 2024 de l’ONU, intitulé « Gouverner l’IA au bénéfice de l’humanité », fournit une feuille de route stratégique pour répondre aux enjeux éthiques, économiques et sociaux posés par cette révolution technologique.

Les promesses de l’IA : Développement durable et inclusion sociale

Le rapport met en lumière les multiples domaines où l’IA peut avoir un impact significatif.
Dans le secteur de la santé, des algorithmes avancés permettent d’améliorer la précision des diagnostics, d’optimiser la gestion des ressources hospitalières et de développer de nouveaux traitements. En agriculture, les systèmes d’analyse prédictive aident à maximiser les rendements tout en minimisant l’empreinte écologique. L’IA joue également un rôle crucial dans la lutte contre le changement climatique, en optimisant les réseaux énergétiques et en modélisant les effets de politiques environnementales. Enfin, elle est identifiée comme un levier pour accélérer la réalisation des Objectifs de Développement Durable (ODD), notamment dans les domaines de l’éducation, du combat contre la pauvreté et de la sécurité alimentaire.

Les lacunes actuelles dans la gouvernance mondiale

Malgré ses promesses, l’IA expose encore des failles préoccupantes, notamment en matière de gouvernance.
Le rapport souligne une représentation inégale à l’échelle mondiale. Les pays du Sud, en particulier, sont largement exclus des discussions internationales. De plus, le manque de coordination entre initiatives nationales et régionales entraîne une fragmentation des efforts, freinant l’établissement d’une vision globale cohérente. Enfin, l’exécution des engagements pris reste insuffisante, limitant l’impact des politiques adoptées.

Les risques majeurs associés à l’IA

L’ONU identifie plusieurs risques associés au déploiement de l’IA. Parmi eux figure la propagation de désinformation via des modèles génératifs, les biais algorithmiques exacerbant les inégalités, et les risques pour la sécurité publique, notamment liés aux armes autonomes. Les systèmes d’IA opaques, déployés sans régulation adéquate, posent des défis en matière de responsabilité et de transparence. Ces dangers soulignent l’urgence de mettre en place une gouvernance globale pour prévenir des dérives susceptibles de menacer la paix et la stabilité internationale.

Une vision commune pour une gouvernance équitable

Pour répondre à ces défis, l’ONU propose une approche structurée fondée sur trois piliers : une vision et un socle commun de normes, et des avantages partagés.

Le rapport préconise la création d’un groupe scientifique international sur l’IA, inspiré du GIEC, pour fournir des analyses impartiales et des recommandations basées sur des données scientifiques. Ce groupe aurait pour mission d’examiner les capacités, les risques et les opportunités liés à l’IA, tout en favorisant la collaboration internationale. Par ailleurs, l’établissement d’un socle commun de normes garantirait l’interopérabilité des cadres nationaux et régionaux, tout en évitant la fragmentation des approches. Enfin, des mécanismes comme un fonds mondial pour l’IA ou un cadre global pour les données permettraient de promouvoir une participation inclusive, notamment pour les pays les moins avancés.

Renforcer les capacités à l’échelle mondiale

L’ONU insiste également sur la nécessité de développer les capacités humaines et technologiques à travers un réseau mondial de centres d’excellence. Ces centres, interconnectés au sein d’un réseau affilié à l’ONU, auraient pour mission de :

  • Former des talents en IA dans des contextes locaux.
  • Fournir un accès équitable aux ressources de calcul et aux données.
  • Soutenir le développement d’applications adaptées aux besoins spécifiques des différentes régions.

L’objectif est de réduire la fracture numérique et de permettre à chaque pays de bénéficier des opportunités offertes par l’IA.

Un modèle institutionnel agile et inclusif

Pour coordonner ces initiatives, le rapport propose la création d’un Bureau de l’IA au sein du Secrétariat de l’ONU. Cet organe, léger et flexible, agirait comme un catalyseur pour mettre en œuvre les recommandations, coordonner les initiatives existantes, et mobiliser les acteurs clés, y compris les gouvernements, le secteur privé et la société civile. Il aurait également pour mission de favoriser une gouvernance agile et interconnectée, capable de s’adapter à l’évolution rapide de l’IA.

Le rapport conclut par un appel à l’action : en faveur d’un nouveau contrat social mondial pour l’IA. Ce contrat vise à garantir que les opportunités offertes par cette technologie soient équitablement réparties et que les risques ne pèsent pas disproportionnellement sur les populations les plus vulnérables.

 Une opportunité à saisir

Le rapport 2024 de l’ONU marque une étape cruciale dans la réflexion sur la gouvernance mondiale de l’IA. Il offre une vision ambitieuse et inclusive. Mais la réussite de cette initiative dépendra de la volonté des États membres, de l’engagement des parties prenantes, et de la capacité de l’ONU à mobiliser des ressources et à coordonner les efforts. L’avenir de l’IA est encore à écrire.

La question centrale demeure : cette technologie sera-t-elle utilisée pour le bien commun, ou son développement sera-t-il dicté par des intérêts économiques et géopolitiques ? Ce rapport constitue un premier pas vers une gouvernance responsable et visionnaire de l’IA, au service de l’humanité.