Le 14 mai 2025, à Paris, OpenAI et Onepoint lors du Revolution Summit ont ouvert une fenêtre stratégique sur l’intelligence artificielle agentique en Europe. Katia Gilles-Gouzman, responsable de l’expérience développeur EMEA chez OpenAI, et Nicolas Gaudemet, Partner IA chez Onepoint, ont partagé leur vision croisée d’un avenir où les agents intelligents deviennent les nouveaux collaborateurs numériques. Un échange riche, concret, lucide, à la fois technologique et géopolitique.
Une présence européenne consolidée
OpenAI s’implante résolument en Europe. Après Londres, Katia Gilles-Gouzman a vu naître les bureaux de Dublin, Bruxelles, Paris, Zurich, bientôt Munich. Cette présence physique permet un dialogue constant avec les entreprises, les développeurs et les institutions. Une approche territorialisée, à rebours des modèles standardisés, pour répondre aux attentes spécifiques des acteurs européens.
L’équipe Developer Experience joue un rôle fondamental dans l’écosystème OpenAI. Documentation, ressources de démarrage, démonstrations, retours utilisateurs : elle orchestre l’expérience développeur de bout en bout. Elle porte aussi la voix de la communauté technique auprès des ingénieurs produits de San Francisco. L’objectif est d’adapter les outils aux réalités de terrain, accélérer les cas d’usage, construire une IA réellement utile.
Une avalanche maîtrisée d’innovations
L’innovation chez OpenAI est continue. Ces derniers mois, plusieurs nouveautés structurantes sont arrivées :
- L’Agent SDK : un kit pour créer des agents personnalisés intégrant outils et logique métier.
- L’API Responsive : pour simplifier le développement d’agents conversationnels et accéder à des fonctions comme la recherche web ou documentaire.
- Une nouvelle gamme de modèles : GPT-4.1, Mini, Nano – optimisés selon les usages (coût, rapidité, puissance).
- L’intégration du multimodal avec GPT-Image-1 : génération d’images à partir de texte, avec une compréhension fine du contexte.
- De nouveaux modèles audio : transcription et synthèse vocale au plus proche du réalisme.
Cette segmentation permet aux entreprises de mieux doser leurs usages : modèles puissants pour les tâches complexes, modèles allégés pour les fonctions ciblées. Un gain en performance, en coûts et en sobriété.
Pour OpenAI, 2025 est « l’année des agents ». Un agent, dans leur définition, est une IA capable d’agir pour l’utilisateur, avec un set d’outils, des instructions et des garde-fous. Deux agents ont déjà été lancés :
- Operator: effectue des actions sur des interfaces web (réservations, achats, formulaires…).
- Deep Research: compile des rapports de 10 à 15 pages à partir de recherches en ligne poussées.
Un troisième agent, encore confidentiel, est en cours de développement. Ces agents ne se contentent plus d’informer : ils exécutent, pilotent, assistent. Un basculement conceptuel et productif.
Cas d’usage en Europe
L’Europe n’est pas en reste. Plusieurs entreprises ont intégré les outils d’OpenAI :
- Pigment (France) automatise la planification stratégique à l’aide d’agents intelligents.
- Photoroom (France) exploite GPT-Image pour améliorer visuellement les photos produit.
- Astmona (culture/musées) crée des agents conversationnels sur fonds documentaires propriétaires.
- Mirakl (marketplaces) optimise l’intégration et la classification des catalogues fournisseurs.
- Clara (Suède) a automatisé une large part de son service client, pionnier dans l’orchestration multi-agents.
Chaque entreprise adapte les modèles à ses données, son métier, son rythme. L’IA n’est plus une option, elle devient un levier structurel.
Souveraineté, sécurité, confiance
La question de la souveraineté est centrale en Europe. OpenAI répond avec transparence : aucune donnée client entreprise n’est utilisée pour entraîner les modèles. Des options de « zero data retention » existent pour les API. La sécurité est conforme aux standards les plus exigeants, permettant de collaborer avec des acteurs sensibles comme Sanofi ou BBVA.
Côté sécurité des modèles, OpenAI évalue rigoureusement la robustesse et les risques. GPT-4o, le modèle récemment lancé, est le premier à passer un nouveau standard de sécurité. L’approche agentique s’accompagne donc de garde-fous techniques, contractuels et éthiques.
IA économe : vers une sobriété algorithmique
Face aux enjeux environnementaux, OpenAI intègre une stratégie d’efficacité énergétique. Les modèles Mini et Nano consomment moins de ressources. Des systèmes de routage automatique choisissent le modèle optimal selon la complexité de la requête, évitant de mobiliser un LLM surdimensionné pour une tâche simple.
GPT-4o par exemple permet un raisonnement complexe avec une empreinte réduite. Objectif : allier puissance, performance, et frugalité.
L’impact sur les développeurs
Les développeurs sont les premiers utilisateurs, les premiers intégrateurs, les premiers ambassadeurs. OpenAI investit dans des outils adaptés à leurs attentes (via l’Agent SDK, l’API Responsive) et dans la pédagogie. L’objectif est clair : rendre la création d’agents accessible, même sans expertise deep learning.
OpenAI mise aussi sur la diversité. Katia Gilles-Gouzman souligne le besoin d’attirer davantage de femmes dans l’IA. L’IA low-code, les environnements simplifiés et la pédagogie visuelle sont des leviers prometteurs pour démocratiser l’accès au code, dès l’enfance.
Une IA dialogique, contextuelle, utile
À travers ses agents, OpenAI ne cherche pas à remplacer l’humain, mais à l’assister. C’est une IA orientée usages, adaptative, explicable, centrée sur le contexte. Avec GPT-4o, la capacité à « raisonner à voix haute » (chain-of-thought) permet d’éclairer la logique du modèle. Cela améliore la confiance, tout en facilitant la détection d’ambiguïtés. À l’avenir, les agents pourront même signaler une mauvaise formulation d’un prompt ou poser des questions clarificatrices avant d’agir.
Coopération public-privé
L’IA progresse aussi grâce à des alliances institutionnelles. OpenAI collabore avec des organismes de recherche comme l’EHESS, le Max Planck Institute ou l’ESCP Business School. Le dialogue académique reste fondamental pour poser les bases méthodologiques, éthiques et sociales d’une IA européenne. Les entreprises y trouvent un socle de légitimité.
Un tournant technologique et stratégique
Ce que la conférence a mis en lumière, c’est la convergence entre maturité technologique et alignement stratégique. L’Europe, souvent prudente, entre dans une phase plus active. L’agent n’est plus un concept de laboratoire : il s’intègre dans des CRM, des plateformes e-commerce, des solutions RH, des interfaces culturelles. Le modèle économique suit.
Ce changement de paradigme requiert aussi une nouvelle gouvernance de la donnée, une montée en compétences, une réflexion continue sur l’usage.