Jérôme Sageaux est un entrepreneur et business angel, actif dans le soutien et le développement de startups innovantes. Fondateur de Gestrategia SL, il accompagne les sociétés dans leur transition digitale, leur structuration financière et leur croissance. À la tête de Seed Andorra, il dynamise l’écosystème numérique en Andorre en incubant et accélérant des startups. En parallèle, il co-dirige le groupe Elton LEWIN, dédié à la transformation managériale des TPE et PME. Avec une vision axée sur l’innovation et la durabilité, il combine expertise en capital-risque, gestion RH et immobilier pour bâtir des projets à fort impact. Il nous partage son expérience de l’adoption et de l’utilisation de l’IA dans ses entreprises.
Un parcours ancré dans la tech
Jérôme Sageaux débute sa carrière au tout début du web. Passionné par les possibilités offertes par le digital, il se lance dans la création de sites internet et dans l’affiliation.
Dès 2008, il se concentre sur le commerce en ligne. Ses premiers sites e-commerce se spécialisent dans des niches de marché et connaissent un franc succès, attirant un demi-million de clients et générant des millions d’euros de revenus. Ces succès lui permettent d’élargir son champ d’activité à la gestion d’une agence web et au développement de logiciels au Maroc. Il crée des solutions comme des ERP et des CRM destinés aussi bien à ses entreprises qu’au marché local.
Malgré cette diversification, Jérôme choisit de vendre certaines de ses sociétés pour se consacrer à des projets qui allient innovation et liberté entrepreneuriale. Il s’installe à Andorre, qui bien que traditionnellement axée sur le commerce comme celui de l’alcool et le tabac offre une plateforme stratégique pour les compagnies internationales. « C’est un lieu idéal pour les start-ups qui ciblent un marché mondial et n’ont pas besoin d’une présence locale étendue », explique-t-il. Les faibles taxes et l’ouverture internationale du pays constituent des atouts pour les attirer.
Pour dynamiser l’écosystème tech local, Jérôme cofonde un incubateur digital. Ce dernier ne se limite pas à un espace physique : c’est un réseau virtuel qui connecte des entrepreneurs issus de plus de 35 nationalités. Il offre un environnement de collaboration, traitant des domaines aussi variés que la cybersécurité, les applications mobiles, la crypto et le web.
L’incubateur fonctionne principalement sous forme d’entraide. Les membres se réunissent mensuellement lors de meetups informels et participent à des ateliers dans des espaces de coworking partenaires. Ces meetings permettent d’échanger sur les problématiques rencontrées, de tester de nouvelles solutions et de renforcer les liens entre entrepreneurs. Actuellement, six projets sont soutenus, avec une priorité donnée à leur croissance et à leur développement technologique. Bien que l’accompagnement financier ne soit pas encore en place, il constitue une étape future pour consolider l’impact de l’incubateur.
L’IA comme catalyseur de transformation
Jérôme voit dans l’IA un levier pour accélérer la transformation digitale des entreprises. Dans ses différentes activités, il l’utilise pour améliorer les processus, gagner du temps et optimiser les décisions stratégiques. Il insiste sur le fait que l’IA doit être considérée comme un outil, multipliant les capacités humaines plutôt que les remplaçants.
Dans le cabinet de conseil en stratégie qu’il dirige, l’IA joue un rôle essentiel. Ils emploient notamment Chatgpt pour créer des rapports détaillés, analyser des données complexes et poser des diagnostics précis. Ils ont développé des GPTs pour respecter les spécificités des projets et offrir des solutions adaptées à chaque client. « Par exemple, lors d’un audit, l’IA aide à rassembler rapidement des données dispersées, à identifier des tendances et à proposer des pistes d’amélioration concrètes ».
Dans le centre de formation qu’il co-dirige, l’IA simplifie la réalisation des contenus pédagogiques. Elle génère les guides, les présentations PowerPoint et les supports d’exercice, permettant aux enseignants de se concentrer sur l’interaction avec les étudiants. « Cela a réduit de moitié le temps de préparation tout en augmentant la qualité et la pertinence des contenus ».
De plus, Jérôme explore l’utilisation de l’IA pour personnaliser les formations. Les outils analysent les besoins des apprenants et adaptent les modules en conséquence, créant ainsi une expérience sur mesure.
Au sein de l’incubateur, divers projets utilisent l’IA :
- Une application mobile accompagne les patients souffrant du syndrome de l’intestin irritable. En examinant les photos des repas des utilisateurs, elle propose des ajustements alimentaires pour réduire les symptômes.
- Une IA centralise les documents et automatise les tâches liées à la gestion de projet. Elle supervise également les réunions en attribuant les actions à chaque collaborateur.
- Chaînes YouTube créatives qui réalisent des vidéos relaxantes ou éducatives. L’IA génère des scripts, des visuels et des scénarios pour accélérer la production.
Les défis de l’IA
Malgré ses nombreux avantages, l’IA rencontre des réticences humaines. Certains employés craignent que leur expertise soit sous-estimée ou redoutent une perte de contrôle face à des systèmes automatisés.
Jérôme précise que des formations adaptées sont essentielles pour rassurer les collaborateurs et leur montrer comment l’IA peut enrichir leur travail. D’un point de vue technique, l’intégration de l’IA dans des structures existantes demeure complexe, en raison de la fragmentation des outils et des besoins d’interopérabilité.
Pour Jérôme, l’IA n’est pas une fin en soi, mais un moyen de repenser les activités. L’idée principale est de décharger les employés des tâches fastidieuses. Cela va leur donner la possibilité de se concentrer sur des missions stratégiques. Ce gain de temps libère de l’énergie créative, essentielle pour innover et s’adapter aux évolutions du marché.
« L’IA, bien utilisée, transforme la dynamique des entreprises et leur permet d’atteindre un niveau de productivité jamais vu », conclut-il.
Le conseil de Jérôme Sageaux pour les entrepreneurs
« Ne mettez pas en place de solutions d’IA juste pour dire que vous l’avez fait. Implémenter l’IA sans un véritable besoin ou une stratégie claire peut être inutile et coûteux, en particulier pour des petites entreprises avec des ressources limitées. Pour celles où l’IA a un potentiel réel, notamment dans les secteurs technologiques et tertiaires, il conseille d’intégrer cette technologie de manière ciblée et réfléchie.
Commencez par consulter les utilisateurs finaux. Offrez-leur un éventail d’outils adaptés à leurs contraintes et identifiez comment ces solutions peuvent simplifier leur quotidien, améliorer leur performance et leur faire gagner du temps. Cette démarche permettra de prioriser les projets ayant le plus d’impact sur l’organisation.
L’objectif principal ne doit pas être l’innovation immédiate, mais l’accroissement en qualité du travail de chacun. Ce temps libéré favorisera une meilleure réflexion stratégique et ouvrira la voie à une innovation naturelle, portée par des collaborateurs plus disponibles et plus engagés. »